09
Jan

Adélaïde Sheikboudhou, éducatrice de jeunes enfants, nous dit tout sur l’acquisition de la continence.

A quel âge commencer l’acquisition de la propreté ?

La propreté, ce n’est pas un apprentissage, c’est une acquisition. Ça fait partie du développement normal de l’enfant, c’est ce qui l’emmène vers son autonomie donc c’est environ entre deux ans et demi et trois ans, ça peut être un peu plus tôt comme un peu plus tard, ça dépend vraiment de l’enfant.

Quels sont les pré-requis ?

En fait, l’acquisition de la propreté répond à trois impératifs : d’abord il y a l’impératif de la maturation physiologique. L’enfant doit être en capacité de contrôler ses sphincters. Il y a un indice qui montre cette maîtrise c’est quand l’enfant arrive à monter et descendre les escaliers en alternant les pieds.
Le deuxième, c’est la maturation intellectuelle : l’enfant doit être en capacité de comprendre ce qui lui arrive, de communiquer sur son besoin et de comprendre ce qu’on attend de lui.

Le troisième point c’est la maturation émotionnelle et affective :  le fait de donner ses selles et ses urines c’est comme un cadeau que l’enfant fait à l’adulte, donc il y a vraiment un rôle très affectif dans l’acquisition de la propreté. Ça peut être un frein comme un moteur.

Comment s’y prendre ?

Il y a plusieurs manières de procéder. On peut accompagner l’enfant : au début, il faut d’abord être très observateur avec l’enfant. Si on voit qu’il est intéressé par les toilettes ou le pot, qu’il se retient, qu’il apprend déjà à se retenir… Ce sont des petits signes qui montrent qu’il est prêt à entrer dans la propreté. L’adulte à ce niveau là a un rôle d’accompagnateur. On peut aussi commencer avec des histoires comme “Petit Loup va sur le pot” et “Tchoupi va sur le pot”, il y en a plein. Ensuite on on peut continuer avec des jeux, comme les poupées avec un petit pot, que ce soit fille ou garçon : les poupées c’est pour tout le monde ! Et ensuite ça va être aussi “accessoiriser” la maison : donc acheter un pot qui reste à une place fixe, qui ne suit pas l’enfant. Le pot il reste à une place fixe, il ne doit pas être non plus devant la télévision pour ne pas être confondu comme un siège ou un espace de jeu. Ca doit être vraiment une fonction de pot, donc le mieux c’est ou à côté des toilettes si ça le permet, sinon dans la salle de bain. C’est un endroit où il sera dans son intimité et il faut que ce soit accessible donc portes ouvertes etc. Si l’enfant va passer directement aux toilettes, il faut acheter un réhausseur avec un réducteur de toilettes, parce qu’il y en a qui passent directement aux toilettes et qui ne veulent pas passer par le pot.

Que choisir entre le pot et les toilettes ?

Un enfant qui n’est pas propre à l’âge de 3 ans, ce n’est pas dramatique. Il le sera à un moment donné, quand lui en aura vraiment envie et qu’il sera en capacité de l’être. Il faut vraiment ne pas se stresser, parce que le parent qui se stresse, transmet son stress à l’enfant et ce n’est pas du tout la bonne manière de faire. Après, il n’y a pas une manière miracle. Chaque enfant est différent et il faut juste l’accompagner et avoir confiance et le féliciter.

Comment mieux gérer la première rentrée ?

L’entrée à l’école, c’est vraiment un moment de stress pour les parents et en général les parents stressent au moment de l’inscription, ça commence à cogiter : “Il n’est pas encore propre”… mais là il faut vraiment l’accompagner comme je disais. Commencer par les petits livres, lui expliquer qu’à l’école il faut qu’il soit propre donc l’accompagner dans ce sens. Après à l’école, on n’a pas le droit de refuser un enfant qui n’est pas propre, ça légalement, ce n’est pas possible. Ce qu’il faut c’est vraiment communiquer avec l’équipe éducative, donc le directeur, qui va trouver sans doute une solution : faire des demi-journées, ou alors une rentrée plus tardive pour l’enfant. Mais il ne faut vraiment pas stresser l’enfant à ce niveau-là ni lui mettre la pression car ça peut faire un effet totalement contraire même créer des troubles au niveau des selles et autres.

Comment savoir que l’enfant est propre ?

Donc on dit qu’un enfant est propre lorsqu’il peut communiquer sur son besoin : il va, où il demande pour aller aux toilettes ou au pot. Et également quand il a cette autonomie au niveau de se déshabiller : il peut enlever son short, sa jupe, son slip ou sa couche. Là on considère qu’un enfant est propre et qu’il fait aux toilettes. Après il y a toujours des petits accidents, la propreté ce n’est pas une acquisition. Ce n’est pas linéaire, il y a des hauts, il y a des bas, en fonction aussi de la vie, si l’enfant vit quelque chose dans sa famille : divorce, ou autre, ou une naissance. Il peut y avoir une régression. Cela dépend quand l’enfant, où l’enfant est gardé, s’il est en crèche, il va vouloir aller plus rapidement vers la propreté parce qu’il va imiter les copains qui vont aux toilettes et autres…mais un enfant qui est tout seul à la maison et qui ne verra pas spécialement ses parents aller aux toilettes ou quelque chose comme ça, ça va être peut-être plus lent. Ça dépend vraiment de l’enfant : quand l’enfant est prêt. Ce n’est pas justement quand le parent est prêt. Il faut faire la différence c’est vraiment l’enfant qui doit être prêt et le parent l’accompagne, enfin l’adulte accompagne. On ne décide pas du jour au lendemain “on commence la propreté”. Non c’est l’enfant.

Comment gérer les difficultés d’un enfant qui a du mal à aller au pot ?

Quand un enfant a des difficultés à aller au pot, on peut mettre en place une routine : exemple, tous les soirs avant d’aller se coucher, on passe aux toilettes pour éviter les pipis au lit. Après, un enfant ne deviendra pas propre du jour au lendemain, de jour et de nuit. C’est d’abord le jour, et ensuite la nuit. Après ça peut arriver qu’ils soient propres de jour et de nuit mais en général c’est comme ça. Il faut vraiment mettre des rituels et après ne vraiment jamais forcer un enfant à aller aux toilettes. Il ne le veut pas, il faut respecter le besoin de l’enfant.

Parfois on observe une régression, comment gérer cette situation ?

En cas de régression, il faut continuer à parler à l’enfant et ne surtout pas le traiter de “bébé” . Il faut dédramatiser la situation, les accidents ça arrive, ça arrive même aux adultes, donc vraiment dédramatiser la situation et lui dire qu’on a confiance en lui, toujours lui dire qu’on a confiance et l’encourager à continuer dans sa lancée.

Faut-il laisser l’enfant sans couche pour aider l’acquisition à la propreté ?

Non pas spécialement. Après on peut le faire de temps en temps mais il vaut mieux qu’ils deviennent autonomes et qu’ils sachent déjà se déshabiller. Enlever sa couche ou son slip, parce que là, ça l’emmène vers l’autonomie. Le laisser sans couche c’est la facilité, mais dans la vie de tous les jours, il faudra qu’il soit habillé, donc il vaut mieux. Après on peut commencer, pour faire la transition, entre couches et slip ou culotte, avec une couche culotte, comme ça il doit la descendre.

Que faire en cas de constipation de l’enfant ?

Alors oui il peut y avoir aussi des difficultés, comme la constipation. Donc là, il ne faut pas hésiter à aller voir le pédiatre. Comme je disais, il peut y avoir aussi des événements dans la vie de l’enfant qui pour nous sont anodins et qui pour lui sont très importants. Là, il ne faut pas hésiter à aller consulter un psychiatre, un pédopsychiatre. C’est important pour qu’il puisse en parler ou essayer de comprendre ce qui se passe et surtout il faut beaucoup communiquer avec l’enfant donc lui parler, lui expliquer ce qui lui arrive. Parce qu’il peut y avoir des angoisses vis-à-vis du fait que l’enfant perd une partie de lui quand il va aux toilettes. Il ne se rend pas compte que ce sont des selles. Pour lui, c’est une partie de lui, il peut y avoir vraiment des grosses angoisses par rapport à ça, donc vraiment l’accompagner, lui parler et ne pas hésiter à consulter des spécialistes.

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